Enter 20 et 21 ans j'ai continué à me battre avec l'envie de "fuir". Tous les jours je me suis exercé à trouver un équilibre entre le haut et le bas, entre le durcissement et le relâchement, entre la solitude et la communauté.
Une idée qui me préoccupait beaucoup, c'était la question sur la continuité du monde. C'était je pense autour de mes neuf ans que cette question commença à me travailler. Quand s'est-elle formulée dans mon esprit pour la première fois? Je ne m'en souviens pas. Elle semblait avoir été tout simplement là dans mon esprit depuis toujours. Cette question était: « Le monde continue-t-il d'exister quand je ferme mes yeux ? » J'étais si persuadée que j'étais une participante active au devenir de la Terre. Si j'arrêtais de la regarder, comment pouvait-elle continuer à exister ? Sans moi la Terre allait sûrement se désintégrer et mourir. Je passais de longs moments à des expérimentations, mais en trichant. Je fermais mes yeux un moment pour laisser les choses se faire tranquillement, après quoi je plissais mes yeux pour voir à travers les petites fentes. J'étais perplexe de constater que le monde autour de moi était toujours présent. Enfant je n'ai jamais résolu ce mystère. La question me poursuivra toute ma vie.
De la mi-vingtaine à la mi-trentaine, j'avais souvent l'impression de me sentir dans un précipice surplombant un abysse. Pendant ces moments, j'avais l'impression que mon corps physique était sur le point de se dissoudre dans le néant. Une grande peur agrippait mon âme car j'avais l'impression de perdre conscience pour toujours et à jamais. Ces moments me sont venus à l'improviste ou au milieu d'une médiatisation. J'appellerais alors mon esprit dans mon corps et penserais aux choses les plus terre-à-terre, terre-à-terre. Pour chaque fois j'ai craint que je n'étais pas suffisamment préparé pour franchir le seuil.