Mon histoire

J’ignore quand la passion du dessin et de la peinture se manifesta en moi. Par contre ce dont je me souviens c'est que mon père me disait que je tenais déjà un crayon avant même de savoir marcher. Je dessinais comme tout enfant qui aime les couleurs et griffonne, insouciant.

Mon premier exercice de style eu lieu à l’école primaire. Je choisis de dessiner une Vierge Marie qui me valut le second prix. Le premier fut décerné à un garçon qui avait dessiné un navire de guerre prêt au combat.

L’amour des arts continua à se développer grâce à l’attention que me portait mon père dans ce domaine. J’étais devenue une autodidacte et une vrai passionnée de la peinture.

Grandir à Washington DC fut certes une aubaine. Presque tous les week-end mon père nous emmenait, ma sœur et moi à la National Art Gallery ou au Smithonian Institute, pour ne citer que ces deux là. A Washington DC l’accès des musées est totalement gratuit.

A douze ans mon père décréta que j’étais mûre pour apprendre la peinture à l’huile ! Ainsi après chaque visite de galerie je me ruais à la maison et m’appliquais, pendant d’interminables heures, à copier les grands maîtres. Ma timidité m’empêchait de travailler à même la galerie comme le faisait nombre d’étudiants. Je m’essayais aussi au fusain et au pastel.

Un jour mon père me dit qu’il n’avait plus rien à m’enseigner. A quatorze ans je décidais de peindre et dessiner directement d’après nature. Tout me fascinait, vieilles chaussures, arbres corps humains.

J’ai eu beaucoup de mal à trouver des modèles qui auraient bien voulu poser nus. Je voulais étudier l’anatomie. A cette époque je découvrais aussi que plus j’observais le monde extérieur plus mon monde intérieur s’intensifiait. Je lisais intensément tout sur les maîtres qui m’inspiraient le plus et notamment Klee et Kandinsky. La révélation se fit en pleine nuit quand je me réveillais, fiévreuse.

Je ne pouvais me rendormir sans avoir terminé ma toute première grande toile. Cette année là, le 14 septembre 1971, j’écrivais dans mon journal : « Un jour je serai une artiste. Je veux exprimer mes sentiments les plus profonds au travers la peinture et le dessin. Je veux créer mon propre style et ne pas copier le monde tel que je le perçois mais en capturer la quintessence. Je sais que cela sera dur et long mais je sais aussi qu’un jour cela sera payant. » Ces paroles s’avérèrent presque prophétiques puisqu’à 20 ans je me mariais et donnais naissance à trois enfants. A 28 j’enseignais dans une école maternelle. Mais pour pouvoir conserver intact mon amour pour la peinture il fallait désormais le partager avec l’amour d’une épouse, d’une mère, d’une professeur et d’une amie.

Cette situation avait pour conséquence un surcroît de travail et de problèmes. Quand à l’âge de 14 ans je réalisais que ma vie n’aurait aucun sens sans la peinture j’arrivais à la triste conclusion que dans cette école où j’enseignais, l’art se mourait. En plus j’étais amèrement consciente que j’ignorais absolument tout de la couleur et n’avais personne vers qui me tourner. A cette époque je commençais une quête de spiritualité intérieure.

J’ai quitté ma maison à quinze ans et demi. Le destin me mena en Allemagne où je rejoignais l’Ecole Rudolf Steiner (Waldorf) pour les quatre dernières années d’étude. La manière dont tout ceci arriva continue, encore aujourd’hui, de m’étonner et me remplir de gratitude.

En résumé je dirais qu’en pénétrant pour la première fois dans l’école et que j’ai vu les formes et les couleurs qui m’entouraient, j’ai su, enfin, que l’étais à la maison que j’avais rejoint le paradis ! Il existait donc une école qui portait l’art en grande estime. J’avais trouvé l’endroit où je pouvais apprendre la nature de la couleur. Nous étudiions la théorie des couleurs et de la lumière en physique, selon Goethe, appliqués à la peinture.

Ma nature rebelle ne s’en contenta pas. Puis vint le voyage en Italie. Me sentiments par rapport à l’art étaient maintenant bien établis. La vie continuait et je m’épanouissais parmi les enfants, dessinant et illustrant des contes de fées. Et s’il me restait un peu d’énergie je retournais à mon chevalet pour peindre pour moi même.

Dans les années 80 un intermède mineur survint qui marqua un tournant dans la détermination de mon style personnel. Un second intermède se manifesta en France dans les années 90. Je cherchais ma voie. Jusqu’alors rien ne me paraissait « vrai ». je devais créer mon propre style. Au printemps de l’année 2002 je décidais de quitter l’enseignement du moins pour le moment. Mais mes démons ne cessaient de m’assaillir.

Tout cela ne serait qu’un rêve illusoire ? Je décidais donc de réprimer mes peurs. Je partirais en voyage : Cap Breton, Nouvelle Ecosse, Maroc, France, Italie, Europe de l’est, Portugal, Grèce et jusqu’en Crète. Je découvrais, tout au long de ces voyages et de mes diverses lectures, une passion qui trouvait ses racines en Irlande, celle du « Féminin Sacré ».

De la même manière que les enfants ont été mes vrais maîtres tout au long de ces années, toutes ces images ont largement contribué a apprendre bien plus sur ce nouveau monde qui commençait à se former en moi. C’est ce que je voudrai partager. Je me forgeais un monde en adéquation avec moi même. Une rencontre me permis de ne plus faire la girouette. Rester calme et écouter. Une fois de plus je revenais à la maison. Je suis profondément reconnaissante au monde de m’avoir donné la chance de « trouver mon cœur et ma voix »

Martina WESTOVER, 2009