Un jour, je pense que j'avais neufs ans, je me suis promenée dans une rue de notre quartier. Je ne pensais rien de précis et me sentais plutôt bien.
Subitement, j’eus l'impression que j'étais en train de mourir, que j'allais mourir là, tout de suite. Je n’eus pas le temps de réfléchir à ce qui m'arrivait car immédiatement après, j’eus la nette impression que je venais de renaître. Et à ce moment-là, je compris que j'étais en train de mourir et de renaître sans arrêt dans un cycle éternel. J'avais vaguement le sentiment que ce cycle était inscrit dans mon corps. J'ai réalisé que ce phénomène se déroulait continuellement et si rapidement que personne hormis moi ne pouvait s'en apercevoir. Au même instant j'étais submergée par une grande tristesse. Je voulais expliquer à mes parents que j'étais entrain de mourir. Ils avaient le droit de savoir quand même. Il fallait qu'ils sachent que le processus s'était déjà déclenché en moi. Mais je savais aussi qu'ils n'allaient pas comprendre que tout cela n'était pas grave puisque je renaissais après chaque mort. Et que cela se passera jusqu'à mon ultime mort. Non, je ne pouvais pas le leur dire, alors je me suis tue. Au moment où je suis devenue consciente de ces forces de la mort, la vie de la pensée s'est réveillée de plus en plus fort en moi.
Je reste attentif à mes pensées et mes sentiments . Je distingue l'essentiel de l'insignifiant pour agir d'une façon juste aux exigences du moment. J'approfondis tout choses pour comprendre le principe de la vie.
Mon père était mourant. Je pris le temps « d'être » avec mon père en esprit tous les jours. Je revis intérieurement chaque moment intense que j'ai passés avec lui depuis mon enfance jusqu’à l’âge adulte. Un jour je me réveillai après une sieste et j'entendis clairement qu'il m'appelait : « Martina... ». J'ai tout de suite compris qu'il avait enfin quitté son corps. Je ne le verrai plus. Le jour-même je reçus un message de ma sœur qu'il était parti. Je calculai et je compris que l'heure de son départ correspondait au moment où je l'ai « entendu » m'appeler.